Cuba : découverte de La Havane
Un voyage à Cuba aurait été bien incomplet sans découvrir sa capitale, La Havane. Tant pis pour les 140 kilomètres à parcourir pour s’y rendre, ça ne nous fait pas peur.
Nous réservons donc une excursion à la Havane, la version « VIP » avec voiture américaine conduite + chauffeur + guide + programme 100% personnalisé. Il y avait autrement possibilité d’y aller en bus, en mode « troupe de touristes », mais cette option, bien que moins onéreuse, ne nous enchantait guère. La facture étant un peu salée, on cherche deux autres personnes dans notre hôtel qui seraient intéressées pour venir avec nous, et partager ainsi les frais (le prix proposé est pour la voiture entière, qu’on soit 1 ou 6 dedans !). En quelques heures, et avec l’aide d’un sympathique animateur de l’hôtel, mission accomplie : deux marseillaises partageront l’aventure avec nous.
Mercredi, 8h. Comme tous les jours, on sent qu’il fait déjà très chaud. Notre voiture arrive. Je n’ai aucune idée de ce qu’est la marque du véhicule. Tout ce que je sais, c’est qu’elle est de 1956, et qu’elle semble bien fragile. Le chauffeur râle un peu lorsque l’une de nous entre dans la voiture et claque la porte un poil fort ; je crois qu’il a visualisé sa voiture en train de se démonter en petites pièces à cet instant ! 3 personnes à l’avant, 3 personnes à l’arrière, sur des sièges en cuir intégralement plastifiés de manière à conserver intacte la qualité du cuir d’origine. Et hop, on démarre. Quel boucan (et quelle pollution qui va avec aussi!)! Moi et les 2 marseillaises sommes à l’arrière, et nous n’entendons pas un mot de ce que la guide raconte à l’avant tellement le moteur est bruyant. Bon, c’est pas grave, on posera nos questions après…
Sur le long de notre route, nous croisons énormément de personnes à faire du stop, parfois en groupe de plusieurs dizaines de personnes. Autant de personnes seraient tombées en panne en même temps ? Possible, mais peu probable… Nan. En fait, ces gens-là font du stop pour se rendre à leur travail, pour plusieurs raisons : une grande majorité des cubains ne peuvent pas acheter de voiture personnelle (les voitures appartiennent pour grande partie à l’État) ; puis le réseau de bus est très mal développé, sans oublier le fait que le peu de bus qui passent sont blindés de monde, et passent bien quand ils veulent. Donc, autostop, pas le choix… Celui-ci est même organisé par le gouvernement : des employés habillés en jaune sont là pour hiérarchiser la « file d’attente » d’autostoppeurs et arrêter les véhicules. Quant aux conducteurs de véhicules, dès lors que la voiture appartient à l’État, et qu’il y a de la place dispo dedans, ils ont obligation de s’arrêter à ces spots d’autostoppeurs. Le petit bonhomme en jaune est justement là entre autres pour repérer ces véhicules de l’État (identifiables par la plaque d’immatriculation, semblerait-il), et les faire s’arrêter. Les autres automobilistes, c’est selon leur bon vouloir ! Aussi, lorsqu’en tant que touristes, on loue un véhicule à Cuba, ça peut être bien sympa et très apprécié par les cubains qu’on leur fasse profiter d’un petit bout de chemin dans notre voiture de loc’ (pour rappel : taux de criminalité quasi nul à Cuba, donc quasi aucun risque de tomber sur des détraqués…).
En cours de chemin, nous nous arrêtons au niveau du plus haut pont de Cuba : le Pont de Bacunayagua, de 110 mètres de haut. Occasion de se désaltérer d’une piña colada et d’admirer d’autres splendides vieilles voitures américaines.
Nous nous arrêtons également un peu plus loin, dans un petit village dont je n’ai pas retenu le nom, pour changer de l’argent à la banque. Là, on se sent encore plus dépaysés que partout ailleurs… Le village n’est pas touristique du tout ; d’ailleurs, on sent les regards sur nous. Même si nous pourrions physiquement passer pour des cubains (il n’y a pas de cubain type… on peut être blond aux yeux bleus et être cubain…), l’attitude n’y est pas, entre mon cher et tendre qui fuit à tout prix le soleil et semble se décomposer sous cette chaleur, et moi qui mitraille de photos tout ce que je vois…
Pendant que nous attendons que l’une de nos aventurières marseillaises ait fait du change, nous faisons plus ample connaissance avec le chauffeur de notre voiture. Nous réussissons enfin à le faire sourire, il semblait sur ses gardes depuis le début du trajet. À un moment où Alban a le dos tourné, j’ai eu la conversation la plus passionnante et apparemment la plus typique qui soit avec cet homme :
Lui : « c’est ton mari ou juste ton copain lui ? »
Moi : « c’est mon mari »
Lui : « et ça fait longtemps que vous êtes mariés? »
Moi : « quasiment 3 ans »
Lui : « oh mais c’est beaucoup trop long, il ne faut pas tarder à changer ! ».
On en rigole au final, et il nous raconte que lui a 5 enfants de 9 à 28 ans, de 5 femmes différentes, et admet de lui-même qu’il est « caliente » dans l’âme. Ah bon, on n’aurait pas deviné… Contrairement à ce que nous pourrions penser en voyant de nombreuses filles d’une quinzaine d’années enceintes, les familles cubaines ne sont pas calquées sur le schéma typique latino, avec plein d’enfants. Il semblerait même que la population cubaine tende à diminuer. Les femmes sont mamans jeunes, mais elles vont avoir 1 voire 2 enfants, pas plus. Les hommes, eux, assurent la continuité de leur lignée un peu partout. Peut-être qu’il n’y a pas assez d’hommes pour toutes ! 😉
Nous reprenons la route et arrivons bientôt à La Havane. À l’entrée de la ville, de gigantesques panneaux de propagande peuplent les bords de route.
Nous faisons d’abord un tour rapide en voiture, dans le coeur de la ville, afin d’avoir un aperçu. Les rues grouillent de monde ; ça donne un petit air bordélique comme ça, alors que chacun semble pourtant savoir où il se rend. Les voitures sont en grande majorité de clinquantes et colorées vieilles américaines très photographiées par les touristes que nous sommes. Les bâtiments sont très colorés, mais délabrés pour certains : on imagine alors ce à quoi cette ville ressemblait 50 ans plus tôt, quand tout était neuf et propre…
Lorsque nous arrivons sur l’avenue qui longe le Capitole de la Havane (anciennement abritant une partie du gouvernement, et aujourd’hui centre de congrès et d’expositions), nous descendons de la voiture et nous mêlons à la population. Là, il fait vraiment très chaud, le vent ne nous rafraîchit pas, d’autant plus que l’avenue est très empruntée par ces polluantes vieilles américaines, d’où une accumulation de gaz d’échappement qui nous picote le nez quand nous respirons. Au milieu de ces gaz, nous percevons que l’une des odeurs prédominantes dans cette ville, c’est aussi celle des incontournables cigares.
Après quelques dizaines de minutes à nous imprégner de l’ambiance du coin, nous retrouvons notre chauffeur un peu plus loin, dans un quartier populaire. Il nous emmène dans une fabrique et boutique de cigares et de rhum. Quand on voit le prix du rhum (du bon Havana Club), on n’hésite pas à sauter sur l’occasion, dans la limite de ce que nous sommes autorisés à ramener au Canada. Le lieu est blindé de monde… Le mec qui tient cette boutique peut dormir à vie sur ses deux oreilles sans craindre pour sa situation matérielle, je crois !
Nous poursuivons notre découverte de la Havane avec la place de la Révolution, cette place historique et symbolique pour le peuple cubain, où de très longs discours ont été prononcés par l’emblématique Fidel Castro (parfois plus de 8 heures…) devant plus d’un million de personnes… Aujourd’hui, ce lieu allie 3 figures politiques de grande importance pour Cuba : Fidel Castro, qui a longtemps dirigé le pays, Che Guevara et José Martí (la « Marianne » cubaine), deux noms importants dans la révolution cubaine. Un très haut mémorial a été érigé en ce lieu ; difficile de le rater !
C’est pas le tout mais nos estomacs commencent à crier famine ! La guide nous emmène dans un petit resto plein de charme en haut d’une maison du vieux centre. On se remplit la panse de langouste, de poisson, de viande en sauce créole, le tout dans un cadre bien sympathique, avec une belle vue, et le tout accompagné d’un petit groupe qui reprend des incontournables tubes cubains. La facture est salée à côté de ce qui se pratique normalement… 20 CUC (une vingtaine d’euros par personne). Normalement, pour 7 CUC par personne, tu as moyen de faire un repas complet, à savoir pour éviter les arnaques !
Suite au repas, nous nous promenons dans le vieux centre, de place en place via de petites ruelles pavées et colorées. Certaines façades de bâtiments, comme celle de la cathédrale par exemple, sont vraiment très délabrées, alors que d’autres sont joliment restaurées. L’influence espagnole est très présente dans l’architecture.
De charmants petits restaurants sont répartis partout dans le quartier, pour te proposer des spécialités de langoustes notamment, ou des jus de canne à sucre. Des écolières travaillent sur la restauration des pavés d’une ruelle, tandis que des jeunes enfants tentent d’échanger des ballons contre des vêtements.
Il règne à la Havane une certaine douceur de vivre. On ne sent pas de stress, pas d’agressivité. Lorsque les commerçants t’abordent, c’est jamais sans faire le moindre forcing.
Après notre périple, nous reprenons la route. Il a dû faire très chaud aujourd’hui, de nombreux incendies se sont déclarés un peu partout dans la sèche végétation qui longe la route.
Puis, l’inattendu (mais quand-même prévisible) se produit : la voiture tombe en panne. Embrayage mort. Le chauffeur se montre très efficace et nous trouve une autre voiture avec chauffeur 30 minutes plus tard. Celle-ci est encore plus vieille, de 1951, mais nous ramène à bon port, la tête pleine de bons souvenirs !
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