Asie,  Indonésie,  Journal,  Voyages

Indonésie : vivre un séisme à Bali

Ce dimanche 5 août 2018, alors que nous commencions tout juste notre exploration de Bali, la terre a tremblé sous nos pieds. J’ai plusieurs fois eu peur dans ma vie, mais jamais autant. Retour sur cette expérience mémorable tant elle était effrayante…

Une douce soirée commençait

Après avoir parcouru une bonne partie du sud de Bali en scooter, exténués par l’intense concentration que nous avait demandé la conduite dans ce bazar, on a plutôt envie d’une soirée relax, à déguster des cocktails fruités dans un lieu cozy. On se promène dans un des quartiers sympas de Denpasar, Legian, et on s’installe dans un bar où un groupe local reprenait les plus grands succès de rock. On s’assied sur une longue banquette, partagée avec d’autres clients du bar. Chinois d’un côté, australiens de l’autre : on en oublierait presque que c’est en Indonésie que nous nous trouvons !

On profite d’être posés pour regarder les clichés du jour. Nos boissons arrivent rapidement, et c’est sur un fond de rock de lover qu’on commence à déguster celles ci. Pendant quelques secondes, nous nous sourions, tous deux ravis d’être là, et loin de nous douter ce qu’on s’apprête à vivre…

Et ce petit singe, se doutait-il de la suite ?

Puis la Terre s’est mise en colère…

Subitement, notre banquette se met à bouger, comme si plusieurs personnes assez lourdes venaient de s’y installer et ne cessaient de gigoter. Premier réflexe : regarder nos voisins de banquette et leur faire un regard noir pour leur faire comprendre que c’est pas cool de bouger comme ça. Étrangement, ils ont l’air de nous regarder de la même façon. En 1/4 de seconde, nos voisins et nous-mêmes comprenons que ni eux ni nous ne sommes responsables de ce mouvement désagréable, mais que ça vient de quelque chose de plus grand et bien plus puissant que nous.

Le groupe s’arrête de jouer, puis un court moment de silence s’ensuit avant que le personnel ne coure dehors en criant « earthquake ! earthquake! » pour que les clients suivent. En quelques secondes, la rue est pleine de monde, certains crient, d’autres font des percussions pour accompagner les secousses. Et moi je bugue. Tout bouge autour de nous comme si on était passés de la terre à la mer, on a l’impression d’être sur un bateau en pleine mer. Mon cerveau ne comprend pas, ça bouge, ça panique autour, mais il n’identifie pas ce qui cause cela, et ça le perturbe au point de provoquer un puissant mal de mer (alors que je suis sur la terre !). Alban a déjà passé le cap de la panique lui, et bien qu’il soit également pris d’un fort mal de mer, il est en train de me dire qu’il faut qu’on aille dehors aussi. Mes jambes sont tétanisées, mais j’arrive à suivre, je ne sais pas trop comment. On est censés devoir se placer à un endroit dégagé, mais la rue est étroite, il y a des poteaux et des fils électriques partout, et il y a beaucoup de monde ; en gros, c’est la merde si quelque chose s’effondre !

Puis, d’un coup, plus rien. Le tremblement de terre a cessé. Tout le monde se regarde, doutant de ce qu’il faut faire par la suite, appréhendant une nouvelle secousse. L’angoisse se lit sur les visages, mais à première vue, il ne semble pas y avoir le moindre dégât, matériel ou humain ; c’est déjà ça. Au bout de quelques courtes minutes, le personnel du bar retourne à l’intérieur reprendre le travail ; la moitié de la clientèle ne reviendra pas. Avant de décider quoi faire, on cherche rapidement sur internet les infos concernant ce que nous venons de vivre, l’épicentre, etc. Les gros titres nous affolent : « un séisme de magnitude 7 ravage de nouveau Lombok » (Lombok est une île voisine de Bali, où on avait initialement prévu d’aller). Magnitude 7… plus fort que celui qui avait déjà fait des siennes la semaine passée. On sait que des répliques vont suivre, mais elles seront bien moins fortes a priori. On retourne donc à l’intérieur reprendre là où on en était restés…

Mes jambes et mes mains tremblent encore, et je ne suis plus du tout dans le même état d’esprit que plus tôt ; là, à cet instant précis, je ne me dis plus que je suis contente d’être là. Et pourtant, il valait mieux se trouver où on se trouvait plutôt qu’à Lombok où les dégâts matériels sont immenses et le bilan humain s’alourdit de minute en minute…

Le retour à la réalité

Le séisme a duré quelques dizaines de secondes. Oui, entre le moment où notre banquette a commencé à bouger et le moment où tout s’est arrêté net quand on était dans la rue, on ne parle que de secondes… Mais des secondes qui ont paru une éternité.

Je pense d’abord à mes proches en France qui semblent avoir les informations plus rapidement que nous. J’imagine que ma mère est en panique, et ça ne rate pas ! Ses premiers mots : « Jenny, rentre!« . Évidemment, les infos françaises montraient les images de Lombok en parlant de Bali aussi ; nombreux sont ceux qui ont craint qu’on soit aussi sous les décombres !

Puis je me souviens que j’ai un pote qui se trouve justement à Lombok avec ses parents, et j’essaie de le contacter pour m’assurer qu’il va bien ; initialement sans succès, mais j’ai su après qu’ils allaient bien, bien qu’assez secoués (littéralement) par ce qu’ils venaient de vivre. Une autre amie se trouve sur Nusa Lembongan elle, une île plus proche de Lombok que ne l’est Bali ; un mouvement de panique s’est emparé de cette île, suite à l’annonce d’une alerte tsunami par les autorités indonésiennes. Mon amie est terrifiée, elle a eu la sensation d’être projetée dans le tournage d’un film apocalyptique ; elle prendra le lendemain ses dispositions pour écourter son séjour et rentrer en France.

Et après ?

Qui dit gros séisme, dit répliques… Celles-ci peuvent se compter par centaines et s’étaler sur plusieurs mois. Du coup, je (et bien d’autres!!) vis un peu dans la crainte de nouvelles secousses depuis le séisme de dimanche. J’en ai senti 4 au total, dont une assez forte…

En effet, à l’instant même où je rédige cet article, nous sommes le jeudi 9 août et je suis à une terrasse d’un bar sur une plate forme construite en haut d’une falaise sur l’île de Nusa Ceningan. Alban est descendu surfer. Et devine quoi ? De nouveau un fort séisme vient de nous secouer. Certes moins puissant que celui de dimanche, mais toujours très impressionnant, non seulement car je me trouve plus proche de l’épicentre, mais aussi parce que je suis sur cette p*tain de plate forme instable, que des objets sont tombés, et qu’un bruit sourd accompagnait la secousse… Je te passe les détails de mon ascenseur émotionnel… De plus, j’étais seule à ce moment-là, certes au milieu de nombreux autres touristes, mais sans Alban ; et lui, eh bah il a rien senti, puisqu’il était sur l’eau et non sur la terre ! Je me suis direct renseignée pour savoir s’il y avait risque de tsunami, pour savoir s’il était en danger, mais il n’en était rien. Tant mieux, il a passé un bon moment, lui. « J‘ai pris une super vague! » me dit-il tout joyeux en revenant une heure plus tard…

Depuis le premier séisme, je regarde les choses différemment : à chaque fois que je vais quelque part, je regarde autour de moi pour savoir où je devrais me mettre en cas de séisme, et où courir en cas de tsunami. Et je me pose des questions aussi : quelle est la marche à suivre si on est en train de faire caca lorsqu’un séisme survient 😉 ? (nan parce que c’est pas toujours possible d’arrêter ! hehehe). Bon, je fais de l’humour, mais je rigolais pas sur le coup hein…

Si tu es là, tu fais quoi ?

Conclusion

Alors certes, je ne me trouvais pas sur les îles voisines de l’épicentre lors de ces séismes, mais ça n’en reste pas moins une expérience choquante. Je me suis sentie toute petite, et impuissante face aux caprices de notre planète. J’ai eu la peur de ma vie, littéralement. Le pire, c’est que parmi tous les événements météorologiques et géologiques qui existent, le séisme est celui qui reste le moins prévisible. Un violent orage, tu le vois venir (les migraineux comme moi le sentent venir aussi!) : le ciel s’assombrit, l’atmosphère devient électrique ; tu sais que potentiellement ça peut péter d’un moment à l’autre. Le séisme, bah nan, t’en sais rien, et c’est sans aucun doute pour cette raison que ça fait autant de dégâts…

À toi qui me lis, sache que les catastrophes naturelles, ça ne tombe pas que sur les autres ; si tu voyages sur les îles par ici, ne perds pas de vue que c’est une zone sismique et volcanique, donc renseigne toi ne serait ce qu’un minimum sur ce que tu es censé faire en cas d’événement inattendu de ce genre…

Bonus : quoi faire en cas de séisme et de tsunami ?

Voici quelques conseils à retenir dans le cas où tu serais toi aussi confronté à un séisme :

    • l’idéal est d’être au milieu de nulle part, un terrain de foot, un champ… n’importe quoi où tu n’es pas entouré(e) de bâtiments, de poteaux électriques, etc…
    • si tu es déjà dans un bâtiment et qu’il t’est impossible d’en sortir, écarte toi des vitres et des murs en briques, et place toi idéalement au niveau d’un encadrement de porte, ou sous un meuble qui te semble solide (table en bois massif, en métal…).
    • OCCUPE TOI DE TOI EN PRIORITÉ ; tu t’inquièteras de ton entourage après.
    • essaie de ne pas paniquer, ou du moins pas trop longtemps ! (oui c’est moi qui dis ça… fais ce que je dis, pas ce que je fais!). C’est probablement le conseil le plus difficile à suivre, surtout quand tu vois la population locale courir dans tous les sens et hurler sous l’effet de la panique… Mais ça t’éviterait de rester figé sur place comme moi…

Après un séisme, selon où se trouve l’épicentre, il y a malheureusement un risque de tsunami… Donc si l’alerte est lancée, n’attends pas de savoir qui fait quoi même si tu as un peu de temps devant toi (le tsunami ne débarque pas 5 minutes après), prends des vêtements chauds, de la nourriture, de la boisson, et file sur les hauteurs les plus proches (hautes collines, montagne…). Si tu es un peu blessé(e), essaie de prendre de quoi laver tes blessures et les désinfecter. Tu ne sais pas combien de temps tu vas rester là-haut… Dans tous les cas, si les télécommunications fonctionnent encore, tiens toi informé pour savoir ce qu’il en est de l’alerte tsunami, et ne redescends que lorsque celle-ci est levée.

Pensées aux habitants de Lombok qui ont tout perdu dans cette terrible catastrophe…

***

Suis-moi sur Instagram et Facebook !

11 commentaires

  • Isabelle V.

    Je me reconnais beaucoup dans cet article… J’ai l’impression de l’avoir écrit…
    Nous recommencions a dormir sur nos 2 oreilles et puis.. ce soir ça recommence 😬
    Bon courage si, vous aussi, vous êtes toujours à Bali !

  • Amélie

    Ouf, quelle épreuve dont on se passerait bien ! Très bonne idée de donner des conseils même si je me doute que ça ne doit pas être facile à appliquer sous l’effet de la panique.
    J’espère que tu es remise de tes émotions.
    Et merci pour le fou rire à l’évocation du « que faire en cas de séjour aux toilettes pile au mauvais moment » 😉

    • Jenny

      En fait, c’est assez bête car en allant à Bali juste après le tout premier séisme, j’aurais du m’attendre à vivre des répliques de toute façon. Mais je sais pas, c’est comme si tout ce qu’on voit à la TV. ça n’arrivait qu’aux autres en fait… Plus de peur que de mal, mais un bon ptit traumatisme psy quand même !

  • Corre

    Voilà un article qui traduit parfaitement ce qu on peut ressentir en ces moments de grande solitude. J ai vécu deux séismes à Bali le même jour le 19 août dernier. La peur de ma vie. Le premier (6.4) a généré une peur très forte. Le deuxième 6.9) intervenu alors qu il faisait nuit et que je n avais pas repéré les endroits où aller pour se mettre à l abri a généré une angoisse très forte. Et l angoisse ça ne vous quitte pas de si tôt ( contrairement à la peur qui passe plus vite ). J avais les jambes sciées. Et J ai mis une bonne heure avant d arrêter de trembler. Je précise qu avant de partir , j avais lu des articles sur les choses à faire et ne pas faire en cas de séisme ( car il y avait eu celui du 5/08 ). Je me disais que j etais prête au cas où… La réalité est qu on n est jamais prêts à ça. C est tout simplement traumatisant. Un sentiment de mort imminente. Je ne le souhaite à personne.

    • Jenny

      Merci pour ce témoignage… Ça me file des frissons, ravivant une angoisse toujours présente même plus d’un mois plus tard. Je ne souhaite cette expérience à personne non plus !

  • Bronchart

    Sur l ile de ceningan, lembogan il n y avait pas de risque de tsunami ? Difficile de rentrer dans les terres … c’est tt petit … que faire …

    • Jenny

      Pour ces séismes en question, il y avait en effet eu une alerte au tsunami, levée très rapidement (mais ce qui ne veut pas dire grand chose maintenant qu’on sait que nombreuses sont les bouées de contrôle qui ne fonctionnent plus depuis des années). Les gens montaient alors sur les hauteurs des îles. Elles sont en effet très petites mais contrairement aux îles Gili, elles ne sont pas plates. Je suis catastrophee de voir la quantité de séismes qui secouent la région ces temps ci…

  • Léa

    Je viens de découvrir votre article et merci !

    J’étais sur l’ile de Gili Meno (Lombok) lors du séisme du 5 août et je n’ai jamais vraiment réussi à mettre les mots sur ce qu’il m’était arrivé. Votre article est vraiment pertinent ! Je n’ai jamais eu aussi peur pour ma vie et passer la nuit dehors en plein milieu d’un champs avec les locaux et les quelques touristes dans l’attente d’un éventuel tsunami avec le bruit d’effondrement des bâtiments et les cinquantaines de répliques à quelque chose d’effrayant mais quelque part de surréaliste et fascinant ! On ne se rend pas bien compte de la puissance de la terre et, tout compte fait, de notre vulnérabilité déconcertante.

    Je ne sais si cela a été le cas à Bali mais j’ai été agréablement surprise par cette solidarité et cette gentillesse le lendemain du séisme. Ces locaux qui avaient, pour la plupart, tout perdu mais qui étaient là souriants et prêts à nous aider, nous touristes complètement perdus !

    • Jenny

      Merci beaucoup Léa ! Sur Bali, les dégâts étant été minimes, cette solidarité n’est pas ressortie à ce point ; c’est davantage lors des secousses que, malgré la panique, les locaux guident les touristes.
      Je parlais avec une amie ce matin, qui était sur Nusa Lembongan à ce moment, et elle avait été tellement choquée qu’elle avait été contrainte d’écourter son séjour et de faire appel à la cellule de crise par la suite pour un soutien. Cela a laissé des marques indélébiles chez moi aussi, j’ai tendance à être prise de panique dès lors que quelque chose bouge autour de moi sans que je ne puisse en identifier la cause. Ça passera avec le temps…

Partage ton avis !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

En savoir plus sur My Globe Story

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading